Entretien avec Margarita Vargas Lopez

Retour sur l’entretien mené le 28 novembre 2023 par la Chaire Normandie pour la Paix avec Margarita Vargas Lopez, représentante kawesqar 

Par Leslie Cloud et Margarita Vargas Lopez

Le peuple Kawesqar est un peuple du sud du Chili, jadis connu comme un peuple nomade des canaux austraux du sud du Chili, qui cohabitait avec les peuples Yagan et Selknam. Il y a aujourd’hui 18 communautés autochtones kawesqar reconnues par l’Etat chilien selon la loi autochtone de 1993 et moins de 10 locuteurs de la langue kawesqar. On rappellera ici que la constitution chilienne actuelle, adoptée en pleine dictature militaire et qui soutient le modèle économique néolibéral chilien, ne reconnaît pas les peuples autochtones ni leurs droits. Un projet de nouvelle constitution, protecteur notamment des droits des peuples autochtones a en outre été rejeté par le plébiscite chilien du 4 septembre 2022. 

Margarita Vargas Lopez, du peuple Kawesqar du sud du Chili, est née à Puerto Eden, localité connue comme Jetarke en langue Kawesqar. Sa grand-mère, Margarita Molinari Eden s’est dédiée à la préservation de la culture kawesqar. Aujourd’hui professeure universitaire (Academica), activiste sociale et dirigeante autochtone depuis plusieurs décennies, elle souhaite suivre les traces de sa grand-mère pour la préservation du patrimoine Kawesqar et la protection de leurs droits. En 2021, Margarita Vargas Lopez a été élue en tant que membre de l’assemblée constituante chargée de rédiger un projet de nouvelle constitution pour le Chili (finalement rejeté par le plébiscite du 4 septembre 2022), en tant que représentante autochtone du siège réservé pour le peuple Kawesqar. 

Le peuple Kawesqar, peuple nomade des canaux austraux

Margarita Vargas Lopez (M. V. L. ) : « Nous appartenons à un peuple nomade des canaux austraux. Nos ancêtres parcouraient les canaux austraux. La plupart des Kawesaqar ont dû quitter le territoire de leurs ancêtres. Ils sont partis avec leur culture. Mon peuple vivait en contact avec la nature. Pour développer notre spiritualité, nous devons être en contact avec notre environnement. Notre nourriture principale était constituée de fruits de mer, d’œuf de canards, de cerfs, de fruits rouges, les Calafate. Grâce au nomadisme, nous avons pu pratiquer la pêche aux coquillages jusqu’en 1969 environ. Toutes les familles sortaient en canaux pour récolter les aliments. Nous pratiquions une récolte durable, en ne collectant que le nécessaire pour survivre. Nous pratiquions également de manière durable la chasse aux loups de mer pendant le mois de janvier. La chaire du loup de mer servait à nous nourrir, la graisse de médecine. On s’enduisait de graisse de loup pour supporter le froid et pratiquer la pêche aux coquillages. (…) Les peaux des loups de mer servaient de fourrure pour se couvrir. Peu à peu cette pratique est devenue un emblème culturel et symbolise aujourd’hui le peuple nomade de la mer ». 

I. La colonisation du peuple Kawesqar 

L’impact du colonialisme sur la culture kawesqar 

M. V. L. : « Toutes les familles kawesqar ont été déplacées. Nous avons dû laisser derrière notre territoire ; notre culture manière de voir le monde et nous avons dû adopter le mode de vie occidental. Cela a été le début d‘un changement de culture pour le peuple kawesqar. Nous avons dû parler l’espagnol et oublier en quelque sorte notre identité. Pour les plus âgés il a été difficile d’apprendre l’espagnol. Nous avons dû nous adapter à l’éducation chilienne et le processus d’évangélisation a commencé.  (…) Tout ce processus de transculturalisation avec l’arrivée du catholicisme a eu un impact positif et négatif. On apprend de nouvelles choses, de nouvelles cultures mais nous n’avons pas pu poursuivre nos traditions ancestrales, parler notre langue car on s’est moqué de nous. Les personnes âgées ne voulaient plus parler la langue pour cesser ces moqueries. J’ai grandi entre deux mondes, le kawesqar et le chilien. J’ai dû m’adapter et adopter des traditions qui n’étaient pas les miennes, comme la religion. J’étais dans une école où j’étais obligée de prier. Je ne comprenais rien car notre peuple n’a pas d’êtres supérieurs en tant que tels. Nous comprenons les divinités autrement, en interaction directe avec la nature ». 

« Les premiers contacts avec les hommes blancs nous ont amené les maladies. Mes aïeuls ont dû porter des vêtements occidentaux qui restaient tout le temps humides. Cela a introduit des maladies comme la tuberculose et a créé des ravages entre les personnes de cette génération. Nous avons commencé à oublier nos connaissances sur la navigation. Aujourd’hui nous ne pouvons plus naviguer. Le gouvernement nous pose beaucoup d’interdictions. Nous avons perdu des espaces de navigation et nous avons vu comment les industries extractives se sont introduites sur notre territoire ». 

« Partout où il y avait des peuples autochtones, les forces armées se sont installées. (…) Les anciens et anciennes n’ont pas pu s’adapter avec les militaires.  Dans le cas de notre communauté, l’installation des forces armées a eu beaucoup d’impacts, a engendré des violations de droits de l’homme. Le cas de l’île de Dawson est très triste. Les militaires y ont déplacé les autochtones pour leur enseigner le catholicisme. Les anciens ont dû quitter leur mode de vie nomade. Cela a été très difficile. Nous avons perdu notre langue, notre identité.  Quand on perd sa langue et sa culture, on perd aussi son identité ». 

Les Kawesqar et les zoos humains

Comme d’autres peuples autochtones, les Kawesqar ont également été victimes des zoos humains. Des familles entières ont été emmenées de force pour être « exposées » en Europe, à Paris, comme des animaux sauvages : M. V. L. : « Une fillette Kawesqar est décédée dans les bras de sa mère. Elle n’a pas pu s’adapter à l’atmosphère de Paris. (…) Sous la présidence de M. Bachelet, nous avons amorcé un processus de restitution des restes humains. Nous avons amené ces restes humains au détroit de Magellan ». Elle explique cependant, qu’aucune autre action n’a été menée par l’Etat chilien pour reconnaître les pillages et graves violations des droits des Kawesqar. A ce titre, elle a participé en novembre 2022 à une réunion d’experts organisée par l’Instance permanente de l’ONU sur les questions autochtones et tenue à la CEPAL à Santiago sur la justice transitionnelle et les peuples autochtones, pour témoigner des violences subies et de l’absence de réparation. Elle dénonce l’absence de dialogue pour réparer les dommages causés qu’elle qualifie comme un outrage à la mémoire.

A cet égard, dans le cadre de ses fonctions de constituante autochtone, Margarita Vargas Lopez avait plaidé en faveur de l’incorporation d’un article interdisant le génocide des peuples autochtones. 

II. Un préjudice colonial non réparé

La langue kawesqar en risque d’extinction

En 2022, a été lancée la décennie internationale des langues autochtones pour 2022-2032. Margarita Vargas Lopez est revenue sur les risques d’extinction de sa langue et sur les différentes actions menées ou à accomplir pour préserver et transmettre sa langue. 

M. V. L. :« Notre langue est très riche, nous avons une culture vieille de plus de 6 000 ans. On peut comprendre via notre langue la cosmovision de notre peuple. Dans ma langue, mon nom est sarawi, le petit oiseau blanc. Mon grand-père m’a nommée ainsi. La langue de notre peuple raconte notre histoire. (…) l’UNESCO a déclaré notre langue en situation de vulnérabilité ». 

« Le linguiste Christos Clairis a fait un énorme travail de sauvetage de la langue kawesqar. Il a enregistré des audios, récupéré notre patrimoine immatériel. J’étais petite quand je l’ai rencontrée, en 1973. Il était accompagné du commandant Cousteau. Ils ont visité le peuple kawesqar. Après avoir parlé avec ma famille et d’autres personnes de Puerto Eden, il s’est rendu compte que nos anciens s’identifiaient en tant que Kawesqar et non Alakalufe. Il a conservé des chansons, des photos, des enregistrements sonores sur notre langue. Sans lui nous n’aurions pas de vestiges de notre existence, d’images de nos camarades de ces générations. C. Clairis a été très généreux. (…) Aujourd’hui on essaie de rassembler notre patrimoine pour le léguer à nos descendants ».  

Pour approfondir, voir la session du 11 février 2022 de la Commission systèmes de connaissances de la Convention constituante chilienne, à partir de 2h04. 

L’insuffisance des actions de l’Etat chilien pour préserver la langue et le patrimoine kawesqar

M. V. L. : « Il n’y a pas d’offres académiques permanentes pour apprendre notre langue. Juste des programmes d’apprentissages à travers la Corporation Nationale de développement autochtone (CONADI). (…) Nous aimerions profiter de la présence des anciens encore vivants pour avancer dans l’apprentissage de notre langue avec le gouvernement chilien. (…) Cela doit se faire de façon académique, au sein des écoles, notamment au moyen des nouvelles technologies. (…) c’est un devoir que nous avons à l’égard des générations futures. (…) Nos grands-parents ont été reconnus en tant que trésors humains de l’humanité car ils restent les seuls locuteurs humains de notre langue. Cependant, ils ne bénéficient pas de conditions de vie plus dignes ». 

Les atteintes portées aux activités traditionnelles spirituelles et de pêche

M. V. L. « (…) La plupart des Kawesqar sont des pêcheurs et se plaignent de ne plus pouvoir pêcher car leurs lieux traditionnels de pêche sont fermés. Le gouvernement régional met en place beaucoup d’obstacles administratifs. Nous ne trouvons plus de personnes spécialisées dans la navigation des canaux ancestraux comme avant. Nous sommes habitués à la culture occidentale et nous ne sommes plus vraiment faits pour le nomadisme. Pour pêcher, nous devons accomplir beaucoup de formalités administratives. Nous ne pouvons pas nous rendre librement dans les cimetières, les lieux spirituels traditionnels car ils sont entre les mains des forces armées chiliennes. C’est très compliqué. J’espère que des progrès pourront être faits. Je travaille depuis 1998 sur tous ces sujets et je peux dire que nous n’avons pas fait beaucoup de progrès. La loi autochtone n° 19.253 de 1993 ne parle pas vraiment des droits des peuples autochtones. Les instruments législatifs ne sont pas vraiment utiles pour les peuples autochtones et nous avons tous plus ou moins les mêmes demandes. Nous sommes tous des peuples côtiers. Nous souhaitons tous préserver notre patrimoine immatériel et matériel. Je travaille avec un groupe de personnes pour la protection de notre patrimoine, pour la récupération du nomadisme même s’il s’exprime d’une façon différente.  (…) Nous voulons visiter nos cimetières et nos sites traditionnels ». 

Les atteintes portées aux droits aux terres, territoires et ressources naturelles des Kawesqar, en violation de la Convention 169 de l’OIT sur les droits des peuples autochtones et tribaux (C. 169)

M. V. L. : « (…) Parfois, des routes sont construites, de nouvelles ressources sont découvertes. Cela n’est pas mauvais en soi. Cela génère de l’économie mais ces constructions se font sans respecter notre peuple. Selon la C. 169 de l’OIT, l’Etat chilien est obligé de consulter les peuples autochtones en vue d’obtenir leur consentement pour toute mesure administrative ou législative qui concerne leurs territoires. Aujourd’hui, on (l’administration) présente un dossier, 2, 3, 4 personnes d’une communauté vont signer et l’Etat va dire que le projet est conforme à la Convention. Il ne prend pas la mesure des souhaits du peuple. (…) Il y a beaucoup de travail à faire pour que l’Etat chilien respecte les accord signés et ratifiés (…) ».  

« (…) En 2019 le ministère des biens nationaux a créé le parc national kawesqar. Il s’agit d’une catégorie plus protectrice que celle des réserves marines qui permettent l’octroi de concessions aux industries, lesquelles portent préjudice à l’écosystème maritime. Cela va à l’encontre de notre cosmovision. Ces industries ne respectent pas les droits de l’homme ni ceux du peuple kawesqar. Nous sommes 18 communautés organisées et reconnues par l’Etat chilien et par la Convention 169 de l’OIT sur les droits des peuples autochtones et tribaux. Cette convention n’est pas respectée. L’industrie extractive cause des dommages très difficiles à réparer. (…) Tout cela entraîne des risques pour la santé des personnes et des écosystèmes ». 

Une très fragile transmission des savoirs aux nouvelles générations

M. V. L. :« (…) Ma génération, les gens de ma génération sont très intéressés par notre histoire et notre culture mais les nouvelles générations sont assez isolées. Je le comprends car elles sont très intégrées dans la culture occidentale. Le colonialisme a eu beaucoup d’impacts au Chili. Je vois que les jeunes essaient de connaître leur culture mais comme je l’indiquais, le système est tellement bureaucratique que quand nous voulons mener n’importe quel projet, c’est compliqué et les jeunes se lassent de cette situation. Ils préfèrent mener une vie occidentale, oublier leur mémoire et leur culture. Nous avons eu des épisodes qui ont affecté notre quotidien comme la pandémie. Les familles ont passé de longues journées isolées, cela a entravé les interactions entre les générations. Je vois que les jeunes sont isolés, ils ne sont pas très proches de la culture Kawesqar. Il y a cependant quand même un pourcentage de jeunes qui sont intéressés pour apprendre. Ils se sont organisés et ils essaient d’obtenir les connaissances, le savoir. Cela me rend très heureuse. Cela signifie qu’une partie de cette génération veut récupérer cette culture kawesqar. (…) Nous sommes là pour transmettre les savoirs et nos expériences aux jeunes. Nous ne voulons pas qu’ils rencontrent les mêmes difficultés qui ont été les nôtres. Je voudrais qu’ils puissent dire : je connais mon peuple, je peux étudier ma langue autochtone, je peux naviguer, même si c’est un peu utopique quand même ». 

« (…) Les anciens sont tellement savants, ils ont tellement de connaissances, ils savent tellement bien naviguer dans le monde occidental que la plupart du temps ils se taisent, ils observent et quand ils voient que la situation est hors de contrôle, ils réagissent. Ils disent qu’ils veulent transmettre leur histoire, leur culture. Je suis en contact avec des personnes âgées qui sont toujours très partantes pour partager leurs cultures ancestrales. Ils rappellent que nous devons être fiers d’être kawesqar. J’en suis fière et je sens que c’est pour moi une obligation d’être avec eux et de passer du temps avec eux, pour garder ce contact et les rendre heureux ».

III. Margarita Vargas Lopez, de son passé avec ses grands-parents à la Convention constituante

Ses modèles, des grands-parents, José Lopez et Margarita Molinari Eden et son oncle Carlos Eden Maidel 

M. V. L. : « Mes grands-parents, José Lopez et Margarita Molinari Eden étaient mes formateurs. Ils étaient très sages et transmettaient leurs connaissances oralement. Ils étaient très aimables. Je ne les ai jamais entendus se disputer. Ma grand-mère était très joyeuse, une grande dirigeante également.  Au moment du projet « nomades de la mer », les gens disaient qu’elle était une des femmes les plus respectées de la communauté de Puerto Eden. Elle pratiquait le troc avec les bateaux qui passaient. Elle était toujours prête pour le passage des bateaux. Avec d’autres anciens, elle recevait des vêtements en l’échange de cuirs de loup. Elle était une grande négociatrice, très joyeuse. Si elle devait parler avec le gouverneur, elle le faisait car pour elle tout le monde était sur un pied d’égalité. Elle était très sympathique. Tout le monde l’appréciait. Quand on est partis sur Puerto Eden, un temps est passé. Elle nous a rejoints et elle a continué de maintenir la culture et de vendre dans les rues, son artisanat. C’était une façon de continuer d’être nomade en quelque sorte. Elle m’a appris les chants kawesqar. Elle avait une voix très douce et transmettait beaucoup de tendresse. Avant ma naissance, mes grands-parents ont demandé à tout le monde de se réunir car j’allais naître. Ma grand-mère a chanté des chants d’enfance et elle a demandé à ce que je m’appelle Margarita. J’ai beaucoup d’amour pour eux et je remercie l’univers d’avoir pu appartenir à leur famille. J’ai appris ses tactiques. Elle avait plein d’amour pour évoluer dans le système occidental. (…) J’essaie de suivre son exemple ».  

« (…) Carlos Eden Maidel (décédé en mars 2023) est un Kawesqar très admiré. J’admire sa force et sa sagesse. Il est très engagé dans la défense des droits de l’homme et ceux des peuples autochtones. Il a beaucoup travaillé pour les peuples autochtones. Il a beaucoup de sagesse autochtone et politique. Il m’a demandé de me présenter à l’assemblée constituante. Ce qu’il me demande, je le fais, comme s’il s’agissait d’une loi. Il est parti de Puerto Eden quand il avait à peine cinq ans. Il a été adopté par des aviateurs de Puerto Eden. Bien qu’il ait quitté Puerto Eden, il n’a jamais oublié sa culture. Même s’il avait une bonne condition économique, il s’est battu pour la défense des droits de l’homme, il a été en Argentine, en exil, puis il a cherché l’asile politique aux Etats unis, à New York. J’ai beaucoup d’admiration et d’amour pour lui. Les conseils qu’il m’a donnés m’ont beaucoup servi pour argumenter à l’assemblée constituante. Il représente une grande valeur pour le peuple Kawesqar. C’est un grand honneur d’avoir un homme de cette taille. Il est sensationnel. Il est sage et généreux. Tout ce qu’il sait, il le partage ».  

Souvenir du nomadisme passé

M. V. L. : « Je n’ai pas connu le nomadisme. Je sortais naviguer avec mes grands-parents en chaloupe. Je me rappelle aussi qu’ils sortaient naviguer pendant de longues périodes. Je me souviens de la préparation des chaloupes et j’étais triste car mes grands-parents partaient longtemps. Mais j’étais contente à leur retour quand ils amenaient des œufs, une fois un pingouin à ma sœur. Bien sûr, on l’a libéré ensuite. Pendant la navigation, on construisait des camps éphémères avec des cuirs de loups de mer. Quand il y avait ainsi un habitat, cela signifiait qu’il y avait abondance de fruits de mer. Donc on laissait l’habitat quand on partait. Ces tentes restaient là pour permettre à d’autres kawesqar de se reposer, dormir. C’était un signe qu’il y avait des fruits de mer et que d’autres personnes étaient passées par là pour chasser et pêcher. (…) Cela doit être incroyable et magnifique de naviguer dans les canaux et de tomber sur ces camps. Les anciens kawesqar connaissaient très bien les canaux du détroit de Magellan. (…) Nous n’avions pas d’intérêt à agrandir notre territoire car les déplacements étaient libres. Les Kawesqar se retrouvaient amicalement avec d’autres peuples. Ils faisaient des échanges, du troc ».

Retrouvez en ligne, le reportage de l’équipe Cousteau chez la famille de Margarita Vargas Lopez pendant son enfance dans les années 1970 (à partir de 30 minutes)

Son parcours de Punta Arenas à la Convention constituante

M. V. L. : « (…) Après Carlos Eden Maidel, ma principale source d’inspiration a été ma communauté. Ma communauté me soutient dans tout ce que j’entreprends. Ils me soutiennent et m’inspirent en tant que dirigeante kawesqar. J’ai commencé en 1998. Avec un sage kawesqar qui n’est plus avec nous aujourd’hui, j’avais fait du travail territorial. Nous voulions un bureau autochtone à Punta Arenas. J’ai travaillé à la CONADI de Punta Arenas pendant quatre ans. Nous avons formé plusieurs communautés. Aujourd’hui il y a 17 communautés kawesqar. Ensuite, j’ai cessé mes fonctions en tant que fonctionnaire de la CONADI. (…) soit je travaillais pour l’Etat, soit je travaillais pour les droits des peuples autochtones. Donc j’ai pris la voie des peuples autochtones. J’ai commencé à organiser différentes communautés comme la mienne, pour développer notre spiritualité, notre cosmovision. Par exemple, nous collections des jonquillos (une variété de jonc) et nous tissons des paniers. Voici un panier-cheminée fait par une membre de nos communautés. (…) il représente le patrimoine de notre peuple. Anciennement, quand les femmes faisaient des immersions nues, elles rapportaient des coquillages et des fruits de mer dans ces paniers. Il s’agit d’un patrimoine kawesqar que nous devons sauvegarder, tout comme les canoës et les canaux ». 

« (…) Un jour, on m’a indiqué qu’on allait rédiger une nouvelle constitution avec des sièges réservés ; un seul pour les Kawesqar. Je me suis présentée avec mon frère pour avoir la parité. Je suis restée et j’ai porté la voix kawesqar à la Constituante. Les relations avec les autres peules ont été fantastiques. Nos demandes étaient les mêmes. Nous avons créé une commission et j’ai rejoint la commission connaissances, cultures, science, technologie, arts et patrimoines car j’étais intéressée par le patrimoine immatériel ».  

« (…) J’ai plaidé pour que les langues soient protégées en tant que patrimoine. Nous avons gagné et pendant toute cette période, j’ai été accompagnée par des amis, des camarades et par Christos Clairs. J’ai également été coordinatrice du premier organe plurinational crée au Chili avec d’autres frères autochtones. Nous avons été les coordinateurs pour mener à bien la consultation autochtone sur les propositions de nouvelle constitution. (…) 

Je suis également présidente de ma communauté autochtone à Punta Arenas et nous formons une association kawesqar. (…) Nous voulons la reconnaissance des droits que nous revendiquons depuis plusieurs décennies. Ce ne sont pas des privilèges. Nous demandons notre reconnaissance constitutionnelle en tant que peuples précolombiens. Nous avons également un cadre législatif qui protège notre patrimoine matériel et immatériel. (…) Nous avions espoir dans cette nouvelle constitution pour que soient reconnue l’usurpation de nos territoires, pour que le Chili se reconnaisse plurinational, pour avoir des espaces dans la politique chilienne, pour que le consentement des peuples préexistants soit reconnu et respecté au niveau politique et administratif afin que nous retrouvions les droits qui ont été violés par le passé ». 

« (…) (pendant la constituante), les médias ont joué un rôle. Ils sont du côté des grands intérêts économiques. Ils ont tenté d’invalider en permanence notre travail depuis le début. Il n’y a pas eu de soutien »

Merci Margarita Vargas Lopez !

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